Gérard LarcherINVESTIGATION 

Lettre ouverte à Monsieur Gérard Larcher

Vitry, le 18 Juillet 2024

Monsieur Jean BLEZON

37, Rue Vercingétorix

94400 Vitry-sur-Seine (France)

À

Monsieur Gérard Larcher

Président du Sénat de France

15, rue de Vaugirard

75291 Paris CEDEX 06

Objet : Installation d’une base militaire français et de l’OTAN à Port-Bouët, Port Autonome (Abidjan) et l’Aéroport de Félix Houphouët Boigny

Monsieur le Président,

Je viens respectueusement vous présenter des faits d’une gravité qui dépassent l’intelligence des hommes que vous êtes tous. Pourquoi dis-je « vous êtes tous » et non « nous sommes tous » ? Parce que ce que prépare la France dans l’ombre pour la Côte d’Ivoire qu’elle utilisera comme base arrière pour plonger l’Afrique dans la servitude la plus inhumaine, conduira à la catastrophe.

En effet, une réunion tenue à huis-clos au mois de juin 2024 en France, qui a fait le tour du monde sur les réseaux sociaux, nous interpelle. Elle fait comprendre à des« animaux »comme nous, Noirs, que les Blancs français appellent « les hommes du continent d’Afrique », que nous allons être balayés par l’armée de l’OTAN et la France. Dans ce projet funeste, la Côte d’Ivoire figure déjà au rang de colonie à part entière dans le giron de la France libre, une colonie où l’on considère qu’il n’y a que des guenons dans les arbres.

N’allez surtout pas croire à de la plaisanterie, c’est même très grave. Mais avant de continuer, je voudrais par courtoisie et respect vous révéler l’identité de celui qui écrit au garant du peuple français et à ses institutions, pour ne pas rester caché sous les feuilles des palmiers. Mon nom est Jean Blezon. Je suis né le 15 juillet 1932 à Kéglobly, en Côte d’Ivoire. À l’âge de huit ans, j’ai été réquisitionné comme esclave par les colons pour le travail forcé sur les routes, dans l’ouest de mon pays. C’est sur cette même route du travail forcé que mon père a été embarqué pour l’Allemagne en 1939 en vue de participer à la libération de la France.

Je suis bien le fils de Yé Dénis Guéhi, ancien combattant, acteur et témoin de la libération de la France, même si celle-ci continue de faire de ses colonies son marche pied. Mon père avait le grade de sergent, en réalité un grade pour contenter un esclave. Je me souviens également que mon père était adjudant de compagnie à la deuxième compagnie de Bouaké, au centre de la Côte d’Ivoire, dans les années 1948 à 1949, si ma mémoire ne me trahit pas. À cette époque, j’étais un apprenti-couturier et je n’avais pas encore fait mes premiers pas à l’école pour apprendre la langue française. Après la guerre, lorsque mon père est revenu d’Allemagne pour sa permission de trois mois, j’étais sur la route de la servitude. À ce moment-là, j’avais treize ans, l’âge que la France condamne dans ses lois. Enfin, bref !

Je suis arrivé sur le sol français le 05 octobre 1970. Vous me demanderez certainement pourquoi ? De tradition, ce pays était une destination prisée par les hommes noirs. D’ailleurs, cette tradition est toujours en vigueur. Cependant, je suis né esclave français en 1932, aujourd’hui esclave français de deuxième zone. Bien sûr, je vote et paie mes impôts sans compromission comme d’ailleurs au temps colonial, en Côte d’Ivoire. Pour dire vrai, je n’ai jamais été véritablement à l’école. Mais cela fait cinquante-trois ans que je vis sur le sol français. Je ne suis pas un technocrate de la langue française, seulement j’ai un bon maître qui est le Ciel. Depuis ma naissance en 1932, j’étais déjà esclave français dans mon pays avant de devenir français de seconde zone en France. Je comprends que dans ma position il me sera très difficile d’avoir une réponse à mes préoccupations de la part de l’Assemblée Nationale ou de la Présidence françaises. Je ne parle même pas du sénat français. Vous n’accepterez jamais de discuter avec des pays peuplés « d’animaux », parce que l’homme blanc ne discute pas avec des animaux sans intelligence, dont les têtes sont vides.

Pour revenir à mon sujet, Monsieur le Président, vous décidez aujourd’hui, à l’aurore de XXIIe siècle, comme c’était le cas à Berlin en 1885 lors du partage de l’Afrique, de tenir une réunion en juin 2024 pour aller tuer les Ivoiriens avant d’attaquer l’AES. Mais la Côte d’Ivoire est informée du scénario qui se profile. Si celui de 2004 n’a laissé aucun Ivoirien indifférent, celui en préparation ne le sera pas non plus. En 2004, en effet, la France a traversé le pays des Ivoiriens pour aller bombarder son propre camp militaire et porter l’accusation sur le président Laurent Gbagbo. Cette affaire de militaires français tués a conduit l’armée française à éliminer 110 personnes devant l’Hôtel Ivoire d’Abidjan et 60 sur le pont Félix Houphouët-Boigny au Plateau, dans la même année 2004. Et l’État français est toujours prêt de crier sur le toit du mont Blanc que l’Afrique est anti-française, parce que ces milliers d’hommes noirs qu’il tue sont des animaux !

Dans ces conditions, qui est anti-qui ? Vous taxez nos pays de pauvres. Or, dire qu’un pays est pauvre, c’est dire que le peuple de ce pays n’a pas d’idée pour réaliser son développement, qu’il n’est pas mature pour subvenir à ses besoins. Malgré tout, ces pays « pauvres » acceptent de vivre dans leur pauvreté aujourd’hui. Là encore, le système français ne leur facilite pas la tâche. Sinon pourquoi le choix de la Côte d’Ivoire pour servir de base arrière en vue de « génocider » l’Afrique de l’Ouest ? De cette attitude dénuée de bon sens, quelles sont les prérogatives de la Côte d’Ivoire, étant donné que le système français a fait génocider le peuple de Côte d’Ivoire en tuant et bombardant pendant trois jours la résidence présidentielle ivoirienne ?

Il est vrai que l’homme noir est une personne sans valeur, sans considération et sans intelligence, comme le système français l’enseigne au peuple français. Heureusement pour le peuple noir que le peuple français est lucide, du point de vue humain, comme l’homme noir. Les idées de déportation d’autrefois sont en train de refaire surface, parce que l’homme noir n’a pas d’armes, qu’il est impuissant. Comment peut-on dire à son prochain : « Je te défends de vivre ta vie » ? Quelque chose d’inimaginable qui ne se produit qu’au XXIe siècle. Ainsi, le système qui date de 1945 sous le Général de Gaulle, lequel a vu les tirailleurs sénégalais être assassinés au Sénégal à Thiaroye, continue de faire son effet. Nous avons pour preuves les assassinats des présidents noirs après les indépendances. Les dirigeants africains répondent non à la servitude dans laquelle l’État français souhaite qu’ils restent. Mais quand ils acceptent de vivre dans leur pauvreté, la France les combat. Alors, Monsieur le Président, pensez-vous que ce que fait la France est logique ?

À la question posée, même un enfant de quatre ans d’un pays pauvre comme la Côte d’Ivoire sait où vous voulez en arriver ! En ce XXIe siècle, l’homme noir africain demeure toujours esclave sur sa terre. Car c’est trop facile de raconter des balivernes sur des présidents africains qui veulent eux aussi faire à manger à leurs peuples qui ont faim. Je ne vous le fais pas dire, la Côte d’Ivoire du président Laurent Gbagbo a été prise par des rebelles entraînés à Ouagadougou, de 2002 à 2011. Pendant cette période, l’armée française, l’ONU et l’OTAN ont tué environ 1.500.000 personnes pour ne déclarer que 3000 morts à Duékoué, Guitrozon et autour de la résidence présidentielle. La résidence du président de la République que la France a bombardée pendant trois jours et trois nuits, avec des tonnes de bombes ! L’Afrique noire entière sait que l’État français est à ses trousses, il continue à esclavager le continent noir.

Tous les pays d’Afrique savent pertinemment aujourd’hui que si le nom du président Laurent Gbagbo ne figure pas encore sur la liste électorale, c’est le fait de la France qui ne le veut pas. Car cet homme que la France a transféré à la Cour Pénale Internationale (CPI) après avoir bombardé sa résidence, était l’une de leurs cibles. Mais par miracle, il n’est pas mort. Il a été pris par l’armée française qui l’a remis aux rebelles que la France a entraînés à Ouagadougou. Sous ce grand soleil, rien n’est nouveau pour les pays africains qualifiés de « pays pauvres » par la France. L’État français prépare l’invasion de la Côte d’Ivoire : la commune de Port-Bouët, l’aéroport d’Abidjan, le Port Autonome d’Abidjan et d’autres sites sont en prospection. C’est de manière implicite une déclaration de guerre à des pays que la France appelle « pauvre » !

Monsieur le Président, à ce jour, l’armée française a pris Korhogo, Bouaké et Abidjan. Ainsi, comme dans le système français le peuple de Côte d’Ivoire devrait être remplacé par des étrangers mais que cela n’a pas été possible, alors l’armée française va se charger de la suite : liquider des personnes sans précédent. Le système français est ainsi devenu anti-peuple ivoirien. Ce peuple est encerclé par une armée qui n’a d’autre projet que l’anéantissement de l’homme noir. Les pays francophones aiment vivre avec la France, mais le système français demande de les esclavager. Cela fait aujourd’hui soixante-quatre ans que l’Afrique noire francophone est à la merci des démagogues du système français. Je le dis en toute sincérité parce que j’ai échangé quelques écrits très importants avec des hommes respectables et des présidents comme F. Mitterrand et J. Chirac pour l’Afrique. J’en sais bien des choses.

Pour clore mes propos, je puis vous dire, Monsieur le Président, que la jeunesse africaine a vu qu’elle est pourchassée aussi bien sur sa terre natale qu’en Europe par le système qui a été établi contre les pays d’Afrique noire. Par conséquent, elle se retire de l’emprise de la France pour vivre dans sa pauvreté, en se nourrissant des feuilles de sa forêt. Dites-moi, depuis quand dans ce monde la communauté internationale choisit-elle le président d’un pays tiers ? Mais vous l’avez fait en Côte d’Ivoire : c’est la France qui a imposé Alassane Dramane Ouattara et l’a établi sur le pays des Ivoiriens, sans l’avis du peuple. Que l’on ne s’étonne donc pas maintenant que chaque pays s’oriente vers un partenaire qui ne nommera pas de sous-préfets dans les pays francophones. Et j’ai dit !

Vous souhaitant une bonne réflexion, je vous prie d’accepter, Monsieur le Président du Sénat, l’expression de ma considération distinguée.

Jean BLEZON

Écrivain-Penseur

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